The larger part of this book deals with the monuments L.
Kroushkova has studied archeologically since 1972. The
book covers the territory of modern Abkhazia. In Late
Antiquity and in the early Middle Ages four areas are distinguished
in the Eastern Black Sea Coast Region: Lazica (South part),
Apsilia, Abasgia. The coastline is connected to the North
Caucasus via important passes (such as the passes of Klukhor, of
Marukh, of Sanchar) in the gorges of the Abkhazian
hinterland. Chronologically, the work deals with the period
of the fourth to the XIV centuries. The author has gathered an
impressive amount of iconographic material, most of it
unpublished.
Almost all the monuments that have come down to us are in a state
of ruins, and most of these have been excavated. Only a few
buildings have retained walls to the original height, and these
buildings have usually been rebuilt, as for instance the basilicas
of Tsandripsh and the aisleless church in Gagra.
Well-preserved (including the dome) is the large church in
Dranda. Apart from church ruins, the
author separately examines architectural decoration.
Some elements of church interiors were imported from Byzantine
workshops on the island of Prokonessos. Local sculptors who
used limestone or less frequently sandstone for reliefs and in some
cases capitals were also involved. Floor mosaics are found
uniquely in the basilica of Pityous.
Les auteurs grecs, à partir de l’époque
d’Homère, nommaient Colchide le territoire du littoral
oriental du Pont-Euxin, situé aux confins du monde
gréco-romain. L’Abkhazie (Abasgia) occupe la partie
nord de cette région, qui a comme particularité
remarquable d’appartenir à la fois au monde caucasien
et au monde méditerranéen et byzantin.
Les témoignages légendaires de la propagation du
christianisme dans cette région remontent aux temps
apostoliques; les exilés chrétiens sont apparus
à l’époque dioclétienne. C’est
justement dans les anciennes villes et forteresses
côtières romano-byzantines qu’on trouve les
édifices chrétiens les plus anciens.
L’évêque Stratophilus de Pityous était
unique représentant du Caucase au premier Concile de
Nicée en 325, son église fut découverte hors
des murs du castellum. D’autres basiliques furent
bâties à Pityous et à ses environs durant les
IVe-Ve s.; l’une d’elles a
reçu un décor en mosaïque. La ville de
Sébastopolis est un autre grand centre chrétien; une
église octogonale s’inscrit bien dans la tradition
architecturale de l’Antiquité tardive en Orient, comme
en Occident.
La conversion de la population indigène fut liée
à la politique de Byzance. La basilique de Candripš,
bâtie par Justinien Ier pour les Abasges, fut ornée
richement de marbres de Proconnèse. Les Apsiles, eux aussi,
avait leurs églises modestes à nef unique, dans les
contreforts du Caucase. Une organisation ecclésiastique,
dépendant du patriarcat constantinopolitain, fut
établie après les guerres persano-byzantines, lorsque
la Lazique et l’Abasgie ont fait partie de l’Empire
Byzantin.
Les traditions de l’Antiquité tardive se sont
conservées dans l’architecture de l’Abkhasie
pendant le Haut Moyen Âge. Le plan de la grande église
à coupole de Dranda associe une rotonde et une croix. Plus
tard on observe aussi des influences de l’art non
chrétien, postsassanide, arabe et persan. Un exemple
remarquable est donné par les dalles du chancel de Cebelda,
retrouvée dans la région apsilienne. Ces reliefs
insolites, avec leur programme iconographique bien
élaboré et du style rustique, caractérisent
bien l’art indigène de l’époque du
Royaume Abkhaze. Cette époque florissante a duré deux
cents ans, des années 80 du VIIIe s.
jusqu’aux années 80 du Xe s.
Les rois abkhazes cherchent à être indépendants
de Constantinople, les évêchés abkhazes se sont
organisés au Xe s. En même temps
l’archevêché d’Abasgie du patriarcat
constantinopolitain demeure encore; très probablement
l’immense église de Pytious/Bicvinta/Picunda fut-elle
érigée comme cathédrale de
l’éparchie de Sotèrioupolis. A
l’époque de l’essor du Royaume Abkhaze, son
activité se manifeste par la construction d’une
série d’églises d’un type en «croix
inscrite», qui est devenu prépondérant dans le
monde byzantin au Xe s. Presque toutes de ces
églises se disposent justement entre les deux sièges
constantinopolitains, de Sotèrioupolis et
d’Abasgie.
L’époque médiobyzantine en Abkhazie est bien
illustrée aussi par l’ensemble architectural de
Lykhny, résidence des princes abkhazes
Cacba-Šervašidze. Le complexe, bâti au
Xe s., est composé d’une église
à coupole et d’un palais. Les fresques de cette
église appartiennent au style constantinopolitain de
l’époque des Paléologues. En revanche, le
palais offre des traits de l’art islamique. Le trésor
constitué de monnaies byzantines d’or et de
pièces géorgiennes d’argent, fournit la date
importante pour établir l’histoire longue de cet
ensemble.
C’est aux XIe-XIIIe s., à
l’époque du Royaume des Abkhazes et des Kartliens
(Royaume Géorgien uni), qu’on observe en Abkhazie des
formes architecturales et décoratives géorgiennes. A
la fin du XIVe s., Bicvinta/Picunda devient siège
épiscopale du catholicos (patriarche) de l’Abkhazie
(Géorgie occidentale).
Après la chute de Byzance, on trouve encore sur ce littoral
des anciens sièges épiscopaux. Même au
XIXe s., pendant le rétablissement du
christianisme en Abkhazie, ce sont des grandes églises de
style byzantin qui furent rénovées facilement.