Pratiques d’écriture et enjeux documentaires dans le champ de la féodalité (XIe-XVe s.). Actes de la journée d’étude organisée à Louvain-la-Neuve le 15 avril 2005
La féodalité est un thème majeur de
l’histoire médiévale, et un sujet de
polémique récurrent parmi les historiens de la
société, des structures politiques et
institutionnelles ou encore de l’économie. La
rencontre organisée au Département d’histoire
de l’Université catholique de Louvain le 15 avril 2005
entendait offrir un regard nouveau sur la question, en donnant aux
spécialistes de la féodalité – celle du
Nord comme celle du Sud, peu habituées à se croiser
dans l’historiographie – l’occasion de
réfléchir sur la nature et les usages des sources
écrites propres à leur objet. Ce volume rassemble les
contributions présentées à cette occasion.
La production des juristes médiévaux est
revisitée par Gérard Giordanengo (Paris), qui
s’interroge sur son impact sur l’évolution des
pratiques féodales. Les formes prises par la
diplomatique féodale sont analysées par
Hélène Débax (Toulouse-Le Mirail) et
Jean-François Nieus (Namur) aux
extrémités de l’espace capétien,
faisant ressortir l’immense contraste qui oppose le Midi
languedocien au nord de la France en ce domaine. Plus
spectaculaire encore serait la singularité flamande, selon
l’hypothèse développée par Dirk Heirbaut
(Gand) : le bon fonctionnement d’une
féodalité centralisée au profit des
comtes aurait rendu tout recours à l’écriture
superflu avant le XIVe siècle. Karl-Heinz Spiess
(Greifswald) se concentre quant à lui sur les plus anciens
relevés de fiefs et de vassaux dans l’Empire, pour
souligner leur caractère mémoriel dans une
société aristocratique en train de s’ouvrir
à la culture écrite.
Les autres contributions sont axées sur les inventaires
féodaux des derniers siècles du Moyen Âge, dont
elles illustrent chacune à leur manière la richesse
pour l’historien. Les registres d’actes de
reconnaissance rendus aux comtes d’Armagnac, scrutés
par Emmanuel Johans (Le Mans), témoignent d’une
instrumentalisation habile des liens vassaliques dans un
État princier en formation. Les imposantes campagnes de
description de fiefs lancées sous le duc de Bourgogne
Charles le Téméraire permettent, selon Antheun Janse
(Leyde), d’esquisser une fresque globale des fortunes
aristocratiques dans le dernier tiers du XVe
siècle. Elles permettent aussi, comme le montre Jean-Marie
Yante (Louvain-la-Neuve) à travers l’exemple de
l’ancien comté d’Arlon, de mener des
enquêtes de géographie historique d’une
précision inédite.
Ces regards croisés sur les « documents
féodaux », aussi riches et variés
soient-ils, n’épuisent certes pas la
problématique complexe et fascinante du recours à
l’écrit dans le contexte féodal. Le
présent volume constitue avant tout une invitation à
poursuivre la réflexion.