"Consacrée à celui qui est présenté comme le premier chercheur professionnel de la Compagnie de Jésus et comme celui qui contribua à l'indépendance des mathématiques en Belgique, cette somme est vouée à l'événement d'une seule journée, les « thèses » défendues le 29 juillet 1624, mais cette journée, elle nous la fait revivre avec brio!" (Jean-François Stoffel, dans: Revue d'Histoire Ecclésiastique, 2014, 109/3-4, p. 496-497)
Summary
En 1624, quelques mois après l’accession de Urbain
VIII au trône de Saint Pierre, plusieurs espéraient un
infléchissement de la condamnation de 1616 visant à
interdire l’enseignement du mouvement de la Terre autour du
Soleil. Etait de ceux-là l’inspirateur des
thèses de 1624, le jésuite Grégoire de
Saint-Vincent, né à Bruges : il avait
d’ailleurs activement participé à la
séance du Collège Romain lorsque Galilée en
1611 avait commenté ses observations au télescope de
planètes comme Saturne, et fait « murmurer les
philosophes » ainsi que le commente Grégoire
lui-même. Les thèses de 1624 montrent une
extraordinaire représentation de Saturne. Voilà un
exemple parmi bien d’autres des surprises de ces
thèses.
Onze chapitres, suivis d’une bibliographie, organisent
l’enquête sur les thèses, celles-ci étant
présentées et traduites au chapitre IX. On commence
par présenter le document, et les problèmes
qu’il pose aussitôt à l’historien. Puis on
choisit de parler du moment même des thèses, de
l’imaginaire des hommes de cette période, et des
positions épistémologiques des thèses, tant
pour le texte que pour les images. Vient l’enquête sur
les acteurs des thèses, et deux récits possibles, le
récit historique de la journée des thèses, et
le récit scientifique du contenu. A ce point on peut entrer
d’une part dans la tradition des thèses
universitaires, d’autre part dans la tradition du livre
illustré. Ce qui, à partir des travaux des historiens
de la mécanique, permet d’aboutir à une
discussion sur la place de ces thèses dans une histoire qui
a tant servi à constituer les diverses philosophies des
sciences, dont le positivisme. Après la traduction
proposée, il convient de revenir à titre de
justification sur le détail de chaque théorème
et de chaque vignette, et de terminer par le vocabulaire même
des thèses. Cette démarche est tout le contraire de
la démarche dogmatique si naturelle à
l’histoire des sciences, discipline dont il faut se rappeler
qu’elle doit beaucoup au positivisme.
Si l’enquête dans les textes et les images
s’avère beaucoup plus longue que les courtes
thèses, le plaisir n’est-il pas au final de retrouver
la cohérence d’un des mondes du baroque à
l’aube de la science moderne ?
L’intérêt est en particulier de surprendre la
façon dont un intellectuel issu d’un ordre religieux
connu pour son obéissance disciplinaire, parvient
malgré la rigoureuse orthodoxie récemment mise en
place, à raisonnablement donner sa place à une
nouvelle imagination, sans entrer en dissidence mais sans
céder, cherchant sans aucun doute à libérer la
pensée religieuse de la pensée scientifique, et
s’aidant alors de la pensée toute profane d’un
peintre d’emblèmes.