Virtus veritatis. Langage et vérité dans l’œuvre de Tertullien

Avec l’avènement du christianisme, la littérature s’est découvert un nouvel enjeu, la vérité ou plutôt la Vérité absolue, celle dont la détention donne accès au salut, et l’œuvre de Tertullien, le premier auteur latin chrétien, répond à cette exigence. À ses yeux la vérité n’est pas une réalité inerte ou abstraite : il existe une uirtus ueritatis, une force, une vigueur de la vérité, qui lui a permis de se manifester dans le monde, avant de se révéler en plénitude à la fin des temps. La vigueur du polémiste elle-même, jusque dans la radicalité de ses positions, se veut à l’image et au service de cette uirtus ueritatis, d’autant plus nécessaire qu’il perçoit cette vérité en résistance, comme assiégée dans le monde païen. Dans cette lutte, le langage, qui peut être aussi bien le médiateur de la vérité que le lieu de prédilection du mensonge, est le terrain naturel de la discussion. Le polémiste se donne donc pour mission de rectifier le sens des mots, rétablir une parole de vérité, restaurer la fidélité et la transparence entre les mots et les choses. Tertullien met au service de cette entreprise sa culture classique, et plus spécifiquement ses connaissances lexicales et grammaticales, ainsi que des éléments de la philosophie du langage des Anciens.