En 1629 Pierre Gassendi se lance dans un projet qui devait
l’occuper jusqu’à sa mort en 1655 et avoir une
profonde influence sur sa propre philosophie. Ce projet
était la préparation d’un traité
détaillé de la totalité de la philosophie
d’Épicure sous le titre de Philosophia Epicuri.
Cependant, il modifia deux fois son projet initial, au niveau de la
disposition et de la présentation des textes. Au terme
de la première révision, le travail se vit attribuer
le titre de De Vita et Doctrina Epicuri. Les résultats de la
seconde révision, élaborée entre 1633 et 1645,
sont parvenus jusqu’à nous sous différentes
formes, soit publiées, soit manuscrites.
Les livres I – VII furent publiés en 1647
sous le titre de De Vita et Moribus Epicuri ; le livre
VIII, « De philosophia Epicuri universe » est
conservé à la British Library, Ms. Harley 1677, ff.
1v – 55r ; les livres XII – XXV consacrés
à la Physique sont conservés à Tours, Mss.
707-710. Nous présentons ici pour la première fois le
texte des livres IX – XI, qui portent sur la Canonique,
composé par Gassendi à Aix-en-Provence en 1636,
conservé à Carpentras, Bibliothèque
Inguimbertine, Ms. 1832,ff. 205r -256r.
Gassendi considérait que la logique était une
branche importante de la philosophie, ce qu’il a
affirmé à divers moments de sa carrière. Le
manuscrit de Carpentras est important parce que,
rédigé à mi-parcours entre la polémique
de jeunesse de Gassendi contre la dialectique d’Aristote et
l’Institutio Logica de sa maturité, il permet de
comprendre comment, à un moment crucial de sa vie,
l’attachement croissant de Gassendi pour la doctrine
d’Épicure l’a aidé à formuler sa
propre vision philosophique sur des questions aussi importantes que
l’existence de la vérité, la valeur de
l’observation et de l’investigation
scientifiques, et la possibilité du progrès.
Le texte, bien évidemment traduit en français, est
ici précédé par une introduction
destinée à éclairer les principales
caractéristiques des livres IX – XI ; il
s’agit de replacer l’exposé de la Canonique par
Gassendi à l’intérieur du contexte
philosophique plus large.