Du milieu du VIIIe s. à 1536, date de la
dissolution des monastères anglais par Henry VIII, diverses
églises d’Europe occidentale (principalement de
Bénédictins et de chanoines) eurent coutume de
solliciter des prières pour un/des membre(s)
défunt(s) de leur communauté au moyen de brefs ou de
rouleaux mortuaires, transmis par des brevigeruli (ou
porte-rouleaux). Les brefs mortuaires, réduits souvent
à des languettes de parchemin, écrits en nombre,
étaient laissés aux églises visitées.
Quant aux rouleaux mortuaires, ils étaient constitués
d’un nombre variable de feuilles de parchemin (le tout
pouvant atteindre 30 m de long) ; chacun d’entre eux
débutait par un faire-part de décès (ou
encyclique) ; à tour de rôle, les églises
visitées par le porte-rouleau apposaient un accusé de
réception (ou titre) ; fréquemment, ils
étaient opisthographes, c’est à dire
écrits sur les deux faces. L’encyclique peut
être précédée, à partir du
XIIIe s., d’une peinture ou de dessins
(souvent d’excellente qualité) et suivie, à
compter du XIVe s., d’une liste des
confraternités conclues par l’église
expéditrice (sorte de liste-programme pour le
porte-rouleau).
Si la plupart des brefs mortuaires ont disparu en raison de leur
petite taille, les rouleaux des morts ont eux-mêmes beaucoup
souffert au cours des âges, nombre d’entre eux ayant
même été dépecés pour servir de
feuilles de garde à des mss. Au total, on ne conserve (en
original, par des copies ou des éditions anciennes)
qu’environ 450 pièces, alors que certainement des
milliers ont circulé. Les plus anciens originaux connus sont
des fragments de la seconde moitié du
Xe s.
Plusieurs critères ont prévalu pour le choix des
quelque 110 planches présentées. Tout d’abord,
bien sûr, un critère paléographique, car
l’ensemble des écritures est daté et
localisé avec précision, ou du moins datable avec une
fourchette chronologique étroite. On trouvera dans ce volume
des écritures livresques, des mentions avec lettres
enclavées (à rapprocher de celles des pages-titres
des mss. ou des inscriptions lapidaires) comme des écritures
cursives ou personnelles ; les pièces retenues ont les
origines les plus diverses, françaises, anglaises, belges,
hollandaises, allemandes, etc. Ensuite, un critère
historique : une copie du début du
XIXe s. témoigne de la mise en circulation
de rouleaux mortuaires par l’abbaye de Ripoll,
malheureusement incendiée peu après ; ou encore
un titre de Noyon montre l’âpreté des luttes
intercommunautaires à propos des reliques. Également,
un intérêt documentaire, comme la charte
scellée, tenant lieu de « rotulus »,
de l’abbesse de Pielenhofen (Bavière ; 1435). Ou
encore, un intérêt artistique avec la reproduction des
magnifiques dessins ornant le début du rouleau de Lucy de
Vere, prieure de Castle Hedingham (Essex ; vers 1230) ou
préparés pour le rouleau de John Islip, abbé
de Westminster (vers 1532). Dans bien des cas, les
itinéraires peuvent être établis avec une
grande précision : une carte retrace celui d’un
rouleau mortuaire expédié en 1406 par Saint-Bavon de
Gand qui, en 20 mois, recueillit plus de 800 titres
d’Amsterdam au nord à Barcelone au sud. Enfin, sont
reproduits divers brefs mortuaires, documents à peu
près ignorés jusqu’alors.
A noter que le présent ouvrage illustre parfaitement le
Recueil des rouleaux des morts, publié sous la
direction de J. Favier par J. Dufour dans la série in-4°
des
Obituaires du
Recueil des historiens de la
France de l’Académie des Inscriptions et
Belles-lettres (déjà 4 vol. depuis 2005).
"L'intérêt des rouleaux des morts est tout à la fois culturel, paléographique, "codicologique" et prosopographique; ils éclairent l'histoire de la peinture médiévale, celle des mentalités et la connaissance des routes et des itinéraires. ... Ce volume de planches est une superbe outil pour les exercices de paléographie et un précieux matériau de comparaison pour les écritures datées." (J. Pycke, dans Revue d'histoire de l'Église de France)
"On ne peut que féliciter l'auteur (et l'éditeur) d'avoir pris cette belle initiative et de mettre ainsi à la disposition du public la reproduction de documents aussi passionnants qu'intéressants pour la paléographie." (B.-M. Tock, dans Scriptorium. Bulletin Codicologique, 2010, 2, p. 257)
"Ce volume de planches est en outre un superbe outil pour les exercices de paléographie et un précieux matériau de comparaison pour les écritures datées." (Jacques Pycke, dans: Revue d'Histoire Ecclésiastique, 2014, 109/3-4, p. 983-986)